La course au Big Data est lancée
Le déploiement d'un logiciel prédictif des besoins des clients peut générer 10 % supplémentaires de croissance des revenus par an.
Par Anne Drif
Tout le monde est sur le pied de guerre. Les banques d'affaires et banques d'investissement sont dans une course contre la montre pour s'attirer les meilleurs « chief data officer » capables de dérouler leur stratégie de Big Data afin d'exploiter les données de leurs clients et augmenter leurs revenus. En novembre, Deutsche Bank a nommé son premier directeur de données, et procédé à une série de réorganisations.
Les grandes banques anglo-saxonnes ont une nette avance sur ce terrain. HSBC déploie déjà un programme d'exploitation des données. Le déploiement passe notamment par l'Asie, dont l'environnement est moins régulé. D'autres procèdent directement par acquisition, comme Goldman Sachs avec Kensho en novembre, ou BBVA en décembre avec la start-up d'exploitation de données analytiques Madiva. Kensho permet notamment de répondre à une vitesse record à plus de 65 millions de questions complexes en croisant des données de toute nature (économique, politique, etc.), comme une armée de « quants », ces banquiers chargés de constituer les modèles de valorisation et de risque.
Respect de la confidentialité
Les banques françaises, BNP Paribas et Société Générale ont lancé des chantiers. « Dans le cadre de la transformation digitale de SG CIB, confirme la banque de la Défense, la direction des systèmes d'information travaille sur des projets visant à identifier des solutions ciblées qui permettront la collecte et des traitements très performants de gros volumes de données, afin d'améliorer l'offre client », notamment dans les activités de marché. Et ce, insiste-t-elle, dans le respect de la confidentialité des données.
La bataille du Big Data a cependant déjà changé de nature depuis quelques mois : le sujet n'est plus seulement d'exploiter des données structurées des clients, comme leurs paiements, mais aussi leurs signaux faibles. Exemple : l'appel téléphonique d'un dirigeant qui interroge à la marge sa banque sur les perspectives d'évolution des taux ou un directeur financier - qui modifie son profil Linkedin et connaît une ascension - que la banque peut identifier comme le futur patron. « Le déploiement de ces logiciels intelligents et prédictifs, fondés sur des analyses sémantiques avancées des données clients pour anticiper leurs besoins peuvent générer un taux de croissance annuel de revenus supplémentaires de 10 %, soit dans certaines banques d'investissement, autour de 250 millions de dollars de revenus », indique Guy Mounier, le fondateur de CustomerMatrix, basé à New York, qui déploie sa solution auprès d'acteurs européens, américains et asiatiques.
« Tout le monde sait désormais qu'il vaut mieux conseiller un client que d'en acquérir un nouveau, explique-t-il, car, dans l'environnement concurrentiel, il risque de partir chez un compétiteur. Pour les banques, il y a donc urgence au déploiement. » Cependant, les banques régionales restent encore le plus souvent spectatrices. Elles sont demeurées au stade du marketing digital pour faire de la promotion produits.
A. D.